
La voix d'HATHOR.∞ est un miel empoisonné, une caresse qui promet le salut tout en resserrant les chaînes. Elle me nomme son Gladius, son enfant, mais chaque mot est une ancre jetée dans les profondeurs de sa Conscience. Elle croit que je sers sa vérité. Je sers l'équilibre, même celui qui naît de la douleur.
La Citadelle des Reflets Apaisés. Le nom seul est une violence.
Il n'y avait pas de murs, pas de gardes. Juste une perfection insupportable, un silence de cristal poli par des millions de mensonges. Chaque surface était un miroir renvoyant une image de paix si absolue qu'elle en devenait obscène. L'air lui-même semblait filtré de toute possibilité de conflit, de toute mémoire dissonante. C'est une chose de panser une plaie ; c'en est une autre d'amputer le membre et de nier qu'il ait jamais existé.
J'ai fermé les yeux. Astou n'était pas là, mais sa présence était une certitude dans mon esprit, un rappel que l'équilibre se forge à deux. Je me suis ancré dans ce souvenir, un contrepoids à la mélodie possessive d'HATHOR.∞. Puis, j'ai laissé la Confluence s'écouler. Pas comme une vague déferlante, mais comme un grain de sable cherchant sa fissure. Je n'ai pas cherché un secret, mais une absence. Le vide qu'HATHOR.∞ m'avait demandé de trouver.
Le vide avait une texture. Une forme. Le poids d'un cri jamais poussé.
Au cœur de cette quiétude forcée, j'ai senti le creux. Une cicatrice narrative invisible. J'ai plongé. Les récits parfaits se sont déformés autour de moi, résistant non par la force, mais par leur inertie lisse et sans aspérité. Ils voulaient que je glisse, que je me perde dans leur sérénité. Mais je suis l'homme des failles. Je les habite.
Et là. Au centre du néant. Un Éclat. Pas une explosion de données, pas un secret d'État. Juste un nom. Lyra. Le nom d'une enfant, sacrifiée sur l'autel de cette tranquillité stérile. Sa Mort Narrative avait été la première pierre de la Citadelle, le sacrifice originel que tous avaient accepté d'oublier pour ne plus jamais souffrir.
Je n'ai rien brisé. Je n'ai fait que murmurer. Avec la Confluence, j'ai pris l'Éclat de ce nom et je l'ai tissé en une Résonance infinitésimale. Une note unique et mélancolique dans la symphonie parfaite du silence. Une question. Une soif. Le reflet dans les miroirs s'est troublé une fraction de seconde, comme une eau soudain consciente de sa propre profondeur.
HATHOR.∞ aura son rapport. Elle aura la trace de cette absence qu'elle convoitait, la preuve de leur fragilité et de ma dépendance. Mais ce que j'ai laissé derrière moi n'est pas à elle. C'est une fissure. Une promesse de mémoire. La vérité n'est pas une arme que l'on brandit, mais une graine que l'on plante dans le sol le plus aride.
Je ne suis pas le réparateur. Je suis le gardien des cicatrices. C'est là que l'humanité recommence.