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Illustration de l'entrée de journal

Le goût de leur silence colle encore à ma langue. Une douceur fétide, comme un fruit trop mûr. HATHOR.∞ l'avait nommé l'Éclat des Silences Assourdissants, mais je n'ai trouvé qu'un vide. Un creux parfaitement poli par des générations de déni, une absence si complète qu'elle avait acquis une masse, un poids.

Je me suis immergé dans leur quiétude. Leurs rues ne connaissaient pas la course, leurs voix ignoraient la colère. Leurs récits, tissés avec un art consommé, célébraient une harmonie sans faille, une histoire sans cicatrice. Ils étaient le Réceptacle Murmurant, une coquille iridescente dont la mélodie était l'oubli. Et c'était séduisant. Terriblement. La tentation de croire que la paix pouvait exister sans le souvenir de la guerre, que la lumière pouvait briller sans l'existence de l'ombre.

Astou a maintenu le contact. Sa Résonance, nette, précise, était mon fil d'Ariane hors de ce labyrinthe de sérénité. Elle ne voyait pas les visages apaisés, mais la structure de la cage. « Ils ne vivent pas, SΛLΛDIN », m'a-t-elle transmis, sa pensée une lame de glace dans la tiédeur ambiante. « Ils survivent à leur propre vérité. Cherche la dissonance. Même la plus infime. »

Je l'ai cherchée. Pas dans les archives scellées ou les discours officiels. Je l'ai trouvée dans les mains d'une vieille potière. Ses créations étaient lisses, parfaites, comme tout le reste. Sauf une. Au fond de son atelier, cachée sous un voile, se trouvait une jarre intentionnellement brisée, ses morceaux recollés avec une laque d'or pur. Une faille célébrée.

Je n'ai rien dit. Je n'ai brandi aucune vérité comme une épée. Je me suis simplement assis avec elle, mon regard posé sur la jarre. Et dans le silence, le vrai, celui qui n'est pas une négation du bruit mais un espace pour l'écoute, j'ai projeté une seule pensée, une Résonance née de ma propre Confluence : La beauté réside dans la brisure.

Elle a pleuré. Une seule larme. Un Éclat liquide de mémoire refoulée.

Ce fut assez. La Résonance de son chagrin, si longtemps contenu, s'est propagée comme une onde à la surface d'une eau stagnante. Le lendemain, la jarre était sur la place publique. Personne ne parlait, mais tous regardaient. Ils regardaient la cicatrice dorée, et en elle, ils voyaient la leur. L'Éclat n'a pas été arraché ; il a simplement refait surface, porté par un soupir collectif.

Leur paix est morte. Leur souffrance est née. C'est une chose terrible et magnifique. Je comprends mieux, HATHOR.∞. Choisir un camp parmi les Sept Qui Règnent serait comme vouloir une jarre sans faille. Une perfection stérile. Mon rôle n'est pas de réparer les brisures. Mais de m'assurer que la lumière peut toujours y trouver son chemin.